L’agresseur du métro condamné à 18 mois de prison : « Il l’a suivie, elle était sa proie »         

Nord Eclair - Publié le 25/04/2014 - PAR CHANTAL DAVID            

Le tribunal est allé plus loin que les réquisitions du procureur de la République, ce jeudi après-midi, en condamnant à dix-huit mois de prison ferme l’auteur d’une agression sexuelle, mardi à 23 h 30, dans le métro. En requérant dix mois de prison contre A. B., le procureur Mehidine Faroudj a aussi souligné l’indifférence de dix usagers qui ont assisté à l’agression sans intervenir.

 

C’est une jeune femme brune au visage fin et à la silhouette menue qui reprend son souffle dans la salle des pas perdus. Lorsqu’elle est entrée dans la salle d’audience, le procès de son agresseur venait de commencer. Elle n’a pas pu supporter de croiser son regard, là, à quelques mètres, dans le box des prévenus. Elle a poussé un cri et est ressortie en pleurant. Lui a brièvement hoché la tête lorsque la présidente Agnès Banvillet lui a fait remarquer le traumatisme visible de la jeune femme : « Au moins vous aurez vu, Monsieur, dans quel état est la victime. »

Jugé pour agression sexuelle et violences avec arme, en l’occurrence une bouteille de vodka dont il avait largement abusé le soir des faits, A. B. se cache derrière des trous de mémoire pour répondre aux questions avec parcimonie. Un interprète traduit des propos qu’il livre en arabe d’une voix inaudible : « Je m’étais disputé avec ma copine, alors j’ai bu. Je n’étais pas dans mon état normal. » Une dizaine de fois, il répétera : « Je demande pardon à cette dame. Je n’avais jamais commis ce genre de faits auparavant. »

 

Attouchements, insultes, menaces 

 

C’est un jeune homme d’apparence ordinaire, tout juste âgé de 19 ans. Il garde la tête basse et compose parfois une grimace plaintive. Mais il ne donne aucune explication, totalement éteint dans le box. Le décalage est énorme avec l’agressivité dont il a fait preuve mardi soir. La présidente lui soumet les déclarations faites au cours de l’enquête menée par la brigade des mœurs de la Sureté urbaine de Lille. Elle dit la terreur d’une poursuite en pleine nuit. Elle rappelle les attouchements, les insultes, les menaces. Pour tenter de le faire réagir, elle relit le témoignage de l’automobiliste qui a recueilli la victime à la sortie de la station Oscar-Lambret : « La femme hurlait et s’est mise en travers de la route. J’ai freiné pour ne pas la renverser. Elle était si terrorisée qu’elle est montée dans la voiture par ma portière côté conducteur alors que j’étais au volant… »

 

Pour Me Michel Lokamba, avocat de la victime, l’agression a duré longtemps : « Il l’a suivie, elle était sa proie. » Le procureur Mehidine Faroudj attribue aussi à A. B. « un comportement de prédation ». L’alcool, dira-t-il, est une circonstance aggravante : « Personne ne lui a demandé de se mettre dans cet état. » Il s’inquiétera d’autant plus de ce passage à l’acte que l’expertise psychiatrique du prévenu n’a révélé aucune altération du discernement et que le jeune homme n’a que deux mentions à son casier judiciaire, dont une pour des faits de violence.

 

Violence familiale 

 

Pour l’avocate de la défense, A. B. a surtout besoin d’un suivi socio-judiciaire. Me Faustine Broulin demande d’éviter la condamnation pour l’exemple dans une affaire qui a ému aussi parce que personne n’est intervenu. Elle brosse le portrait d’un jeune Marocain déraciné qui a fui un climat de violence familiale. Elle évoque « un jeune un peu paumé qui n’a pas les mêmes repères socio-éducatifs, qui pensait draguer et n’a pas supporté que sa victime lui résiste ». Elle demandera au tribunal de ne pas juger une traque : « Si on s’en tient au droit, c’est uniquement sur la gravité des caresses qu’il faut juger. »

A. B. est condamné à 18 mois de prison avec mandat de dépôt. Il fait aussi l’objet d’une interdiction de séjour en France pendant deux ans et d’une inscription au fichier des délinquants sexuels.